Stress et immunité

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Comment le stress influence-t-il l’immunité ?

Le stress se caractérise par une décharge hormonale adaptée à des dangers brefs, de caractère vital, qui nécessitent la fuite ou l’attaque. L’adrénaline et le cortisol mobilisent les ressources de l’organisme pour une réponse courte, de nature motrice : le combat ou la fuite.

En revanche, face à des situations dangereuses ou perçues comme telles de longue durée, comme l’épuisement professionnel ou une pandémie virale, l’excès de sécrétions hormonales entraine une altération de la réaction inflammatoire et une baisse de la réponse immunitaire. C’est le résultat obtenu par des chercheurs d’Aix Marseille sur une population de souris, auxquelles ils ont administré des hormones béta-adrénergiques afin de stimuler les récepteurs à l’adrénaline et noradrénaline[1]. Exposées ensuite à un virus, le taux de mortalité des souris stressées était de 90%, contre 50% pour le groupe témoin. En revanche, en bloquant génétiquement la production de ces récepteurs, l’exposition au virus s’est assortie de 90% de survie chez les souris privées de récepteurs béta-adrénergiques contre 50% pour les autres. Ces résultats permettent d’observer que le stress inhibe la réaction immunitaire innée à l’agression virale, et diminue les défenses de l’organisme.

Il est donc important, afin de soutenir sa fonction immunitaire et -éventuellement- affronter le SARS-CoV-2 dans les meilleures conditions de gérer la tension psychique générée par l’épidémie. C’est un challenge difficile, puisque des situations comme la privation de liberté de mouvement, l’isolement social, liées au confinement, sont connues comme extrêmement stressantes – c’est à proprement parler la punition qu’on inflige usuellement aux criminels.

Ici encore, l’hygiène de vie influence l’état psychique. La nutrition joue un rôle non négligeable dans l’humeur, à travers des mécanismes hormonaux complexes que nous ne détaillerons pas ici. Les aliments fermentés: choucroute, cornichons, pickles, sont des psychobiotiques qui participent de la communication intestin/cerveau, et contribuent à l’entretien de la bonne humeur. Par ailleurs, un apport suffisant en magnésium permet de réduire l’anxiété et la dépression, à tous les âges.

Outre l’exercice physique que nous avons abordé plus haut, des techniques psycho-corporelles permettent de diminuer la tension psychique, l’anxiété, la frustration. Des exercices respiratoires (comme le pranayama), la méditation en pleine conscience, les massages énergétiques, le Qi-Gong améliorent la tolérance à l’épreuve de la peur et de la frustration. Ici encore, de nombreuses vidéos sur youtube élargiront votre horizon sur les méthodes d’éducation du psychisme.

L’association de la méditation en pleine conscience avec un entraînement aérobie (c’est à dire un exercice continu de type course à pied ou natation) obtient des résultats significatifs sur la dépression, comme l’a montré une étude de 2016[2]. L’idéal est donc de coupler l’exercice physique et l’entraînement mental, mais commencer par une de ces activités facilite l’adoption de l’autre[3], alors l’essentiel est de commencer!


La créativité est une autre ressource dans laquelle vous pouvez puiser sans limite: c’est le moment de vous (re)mettre à la guitare, au dessin, à la composition poétique, à l’écriture d’un essai sur un domaine qui vous passionne… L’étude, pour les studieux et les amoureux de la connaissance est un océan sans fond: les mémoires de Saint Simon, le solfège ou l’art de la programmation informatique peuvent dévorer vos heures de liberté et plus encore…

En revanche, les nuits blanches devant le poste de télévision, le déroulement compulsif des pages de réseaux sociaux, l’immersion dans certains univers de jeux ultra-violents, réduisent votre activité psychique à une fonction de réception passive de messages inquiétants, ou de répétition compulsive, qui ne permettent ni le travail de l’imagination créatrice, ni le sentiment gratifiant de prendre le contrôle de votre vie, et risquent d’aggraver votre anxiété, votre agitation intérieure et votre sentiment d’impuissance, les marqueurs psychiques du stress.

Cultiver la bonne humeur, le rire en particulier, réduit le taux de cortisol et d’adrénaline et améliore la réponse immunitaire[4]. C’est un exercice mental à part entière, qui consiste à focaliser son attention sur les éléments positifs de l’existence, dans un objectif optimiste. Si vous êtes un pessimiste endurci, cela aiguisera votre ironie et vous apportera le sens de l’humour, qui permet aux désespérés de briller en société.

La gestion du stress implique un seul effort, celui de vous détourner de la pensée obsédante du danger qui rôde, pour laisser la place à autre chose, l’art, la pensée ou tout simplement la disponibilité au sentiment de l’existence.

Quel rôle joue le sommeil dans l’immunité ?

Le sommeil est fréquemment altéré dans les périodes de souci ou de chagrin. Un sommeil de qualité est pourtant indispensable à la santé, et notamment à la qualité de la réponse immunitaire. Le manque de sommeil réduit le nombre et la qualité des cellules immunitaires face à une agression[5].

Si vous souffrez d’une insomnie d’endormissement, évitez les excitants avant le coucher (thé, café, boissons énergisantes). Une tisane de valériane ou de mélisse favorise l’apaisement préalable à l’endormissement. Une dépense physique suffisante dans la journée facilite le sommeil.

Si vous vous réveillez au milieu de la nuit, vous pouvez opter pour différentes stratégies : boire un verre de lait chaud au miel, attaquer le repassage du linge qui s’accumule dans la buanderie, reprendre la lecture d’un recueil de poésies, ou pratiquer la relaxation grâce aux techniques respiratoires de la sophrologie, du pranayama, ou grâce à la méthode des pensées positives, qui vous conduira à imaginer les beaux moments à vivre qui (re)viendront… D’innombrables vidéos sur youtube vous proposeront une initiation à ces différentes méthodes.

La mélatonine est une hormone qui participe à la régulation du sommeil chez les personnes âgées déficientes en mélatonine, ou les voyageurs en jet lag. Des études sur la souris ont montré que la mélatonine augmente le niveau de cytokines chez les souris infectées et diminue leur mortalité ; mais ces effets n’ont pas été testés chez l’homme. Quoiqu’il en soit, la prise de mélatonine peut être envisagée avec votre médecin, si l’insomnie persiste malgré tout.

Dr Claire Condemine-Piron Présentation de l’auteur


[1] Elisabeth Wieduwild, Mathilde J. Girard-Madoux, Linda Quatrini, Caroline Laprie, Lionel Chasson, Rafaëlle Rossignol, Claire Bernat, Sophie Guia, Sophie Ugolini; β2-adrenergic signals downregulate the innate immune response and reduce host resistance to viral infection. J Exp Med 6 April 2020; 217 (4): e20190554. doi: https://doi.org/10.1084/jem.20190554

[2] B L Alderman, R L Olson, C J Brush, T J Shors. MAP training: combining meditation and aerobic exercise reduces depression and rumination while enhancing synchronized brain activity. Translational Psychiatry, 2016; 6 (2): e726 DOI: 10.1038/tp.2015.225

[3] Bigliassi M and Bertuzzi R (2020) Exploring the Use of Meditation as a Valuable Tool to Counteract Sedentariness. Front. Psychol. 11:299. doi: 10.3389/fpsyg.2020.00299

[4] Dillon, K. M., Minchoff, B., & Baker, K. H. (1986). Positive Emotional States and Enhancement of the Immune System. The International Journal of Psychiatry in Medicine, 15(1), 13–18.

[5] Lange, T. , Dimitrov, S. and Born, J. (2010), Effects of sleep and circadian rhythm on the human immune system. Annals of the New York Academy of Sciences, 1193: 48-59.