Des taux élevés en vitamine D protègent de la Covid-19

Holick and al. septembre 2020 Plos One

Un collectif international de chercheurs et de médecins s’adressent aux gouvernements pour recommander une augmentation de la supplémentation en vitamine D de la population générale, à hauteur de 4 000 UI/jour, afin de réduire les hospitalisations liées à la Covid-19. Après des pétitions et une campagne d’information[1], ils élaborent une lettre ouverte aux gouvernements du monde entier.

La vitamine D, synthétisée dans la peau sous l’effet des rayons solaires d’avril à septembre dans nos contrées, n’est pas une vitamine, mais une pro-hormone. Le foie et le rein convertissent cette molécule en hormone active. Les connaissances scientifiques sur la vitamine D se sont longtemps limitées à ses effets sur la croissance osseuse, jusqu’à ces 20 dernières années, pendant lesquelles son rôle majeur dans le fonctionnement du système immunitaire a été progressivement découvert. Ces derniers mois, avec la pandémie de Covid-19 et les nombreuses études conduites en parallèle, de nouvelles découvertes scientifiques prennent une autre dimension: le déficit en vitamine D pourrait être une cause majeure de développement de formes sévères de Covid-19, et sa supplémentation  un moyen puissant de prévenir la maladie, ainsi que l’évolution vers des formes graves et létales.

De nombreuses études réalisées en 2020 établissent le rôle majeur de la vitamine D dans l’immunité, la prévention de la Covid-19, et même la réduction des formes graves et des décès en cas de contamination au SARS-CoV-2.

La Vitamine D agit sur l’immunité innée comme sur l’immunité acquise. Elle provoque la synthèse d’une protéine, la cathélicidine, dans les macrophages, qui tue les virus et les bactéries.

Un article de Grant WB et al sorti en mars 2020 dans Nutrients [2]montre que la vitamine D réduit le risque de tempête à cytokine grâce à sa liaison avec le récepteur rénine angiotensine.

Dès 1981, Edgard Hope Simpson avait établi une corrélation entre le taux de vitamine D et les infections respiratoires, expliquant ainsi leur saisonnalité, liée à l’influence du soleil sur la synthèse de la vitamine D, insuffisante dans les contrées au-delà et en-deça du 30° parallèle, d’octobre à fin mars dans l’hémisphère nord.

https://www.youtube.com/watch?v=8UzpvtRqleY&feature=youtu.be Dr David Grimes

Des études portant sur le génome ont depuis 2000 montré que la vitamine D influence plus de 80 mécanismes physiologiques via plus de 1000 gènes, et notamment la réparation de l’AND, l’apoptose, le stress oxydatif, les processus métaboliques, l’inflammation…

Une étude de 2006[3] de Franceschi montre que les  marqueurs de l’inflammation sont  inversement proporptionnels au taux de vitamine D.

Une méta-analyse de 2017[4] a confirmé l’action préventive de la vitamine D sur les infections respiratoires, proportionnelle à son taux sanguin circulant.

Le taux normal de vitamine D se situe dans une fourchette qui va de 30 ng/ml à 45 ng/ml, en France, on parle de déficit à 20 ng/ml et moins.

La société d’endocrinologie américaine recommande une supplémentation quotidienne de 400 à 1000 UI pour les enfants, 1000 à 1500 UI pour les adultes, le double pour des adultes obèses.

Se pourrait-il que l’évolution de la mortalité par la Covid-19 en Europe reflète l’évolution des taux circulants de vitamine D dans la population?

https://www.youtube.com/watch?v=8UzpvtRqleY&feature=youtu.be Dr David Grimes

Une étude américaine observationnelle parue en septembre affirme la puissance de la corrélation entre le taux de vitamine et la vulnérabilité face au SARS-Cov-2.

Michael Holick et son équipe de Boston ont publié une étude dans Plos[5] le 18 september 2020, portant sur plus de 191 000 américains. Ils ont repris les taux de vitamine D de ces patients en 2019, et pour chacun le développement ou non d’une Covid-19 en 2020.  La courbe résultante est stupéfiante, et montre une réduction de 54% du risque de contracter la Covid 19, pour les personnes présentant un taux normal basal de 30ng/ml, par rapport aux personnes présentant un déificit, avec un taux inférieur à 20ng/ml.

Holick et al, Plos september 2020

Elle montre également une réduction du risque de développer une Covid-19 proportionnelle au taux circulant de vitamine D avec un plafond optimal à 55 ng/ml.

Holick et al, Plos september 2020

Cette analyse rend compte de la susceptibilité marquée des populations à taux de mélanine élevé à la Covid 19 en Amérique du Nord, liée au taux plus faible en vitamine D de ces populations.

Holick et al, Plos september 2020

L’âge n’est plus un facteur de risque majeur lorsque le déficit en vitamine D est corrigé chez les plus de 60 ans.

Une autre étude de Michael Holick et Harvey Kaufman[6], publiée le 25 septembre dans Plos One, démontre le rôle de la vitamine D dans la prévention et le traitement des formes sévères de Covid-19.

Les critères cliniques de sévérité, la perte conscience, l’hypoxie, le taux de CRP (marqueur de l’inflammation) et la réaction lymphocytaire, sont tous majorés en cas de déficit en vitamine D.

Holick et al, Plos september 2020

Au dessus de 40 ans, le taux de vitamine D est un indicateur robuste du risque de décéder de la Covid-19. Ce risque est d’autant plus élevé que le taux de vitamine D est bas.

Le taux optimal de vitamine D pour obtenir un niveau de risque minimal de contracter la Covid-19 est selon cette étude de 40 à 60 ng/ml de vitamine D, mais nécessite en hiver une supplémentation de l’ordre de 4000 à 5000 UI/j.

Bien que Michael Holick affirme que plusieurs études au long cours ont montré l’absence de toxicité de la vitamine pour des doses allant jusqu’à 10 000 UI/jour, il recommande une évolution plus modérée des apports quotidiens recommandés.

Ceux-ci sont actuellement de 400 UI/jour, et le taux de vitamine D est considéré normal à 30ng/ml, ce qui est très inférieur au taux permettant une bonne protection immunitaire. Holick estime que 2000 UI/jour chez l’adulte et 1000 UI/jour chez l’enfant serait un apport efficace pour la prévention des maladies du tractus respiratoire supérieur en général et de la Covid-19 en particulier.

Les apports alimentaires, à base de poissons gras pour l’essentiel, ne peuvent couvrir ces besoins, et la supplémentation est alors nécessaire.

D’autres études récentes confirment la corrélation entre vitamine D et Covid-19.

La fréquence élevée de l’insuffisance (44%) et du déficit (15%) en vitamine D dans la population de l’hémisphère nord selon une étude allemande[7] parue cet été, serait responsable de 41% des décès par pathologie respiratoire. Une supplémentation systématique pendant la période d’octobre à fin mars devrait se généraliser face à la pandémie de Covid-19.

Une étude du Dr Meltzer[8] et son équipe à Chicago publiée début septembre 2020 portant sur  489 patients, a repris les taux de vitamine D mesurés en 2019,  et les a mis en regard avec l’atteinte par la Covid-19 en 2020. Il en ressort que le risque de contracter la Covid-19  est 1,77 fois plus élevée chez les personnes présentant un déficit en vitamine D en comparaison avec les personnes présentant un taux normal. Or, la moitié des américains présentent un déficit en vitamine D.

De nombreuses études randomisées sont conduites actuellement sur les doses de vitamine D à utiliser en thérapeutique contre les formes sévères de Covid-19, et en prévention pour les professionnels de santé. Certains protocoles de 50000 UI /j pendant 5 jours chez les patients hospitalisés sont actuellement évalués.

La méthodologie des data science affirme la causalité stricte entre le déficit en vitamine D et la létalité de la Covid-19.

Le Dr Davies a utilisé la méthodologie des data science sur 1,6 millions de données sur le rétablissement et le décès de patients dans 240 établissements dans le monde. Son étude[9] – actuellement en preprint- conclut à une relation de causalité forte, et non seulement de corrélation, entre le déficit en vitamine D et le développement de formes sévères de Covid-19.

En conclusion, la rapidité avec laquelle le monde scientifique répond à l’urgence de comprendre les causes et de résoudre la pandémie de la Covid-19, apporte aujourd’hui une solution préventive majeure à prendre en considération. La vitamine D est peu onéreuse, largement sous-utilisée par rapport aux besoins de la population, qui souffre plutôt d’insuffisance, voire de déficit; elle offre de multiples bénéfices pour la santé et peut être un bouclier puissant contre les formes sévères et mortelles de Covid-19. Elle offre une marge de sécurité thérapeutique très importante, et peut être utilisée sans danger par la majeure partie de la population. Les doses recommandées par les chercheurs actifs dans ce domaine vont de 1000 UI/jour à 4000 UI/j, ce qui reste très en-deça de la dose jugée dangereuse de 10 000 UI/j. La proposition de Holick, de 2000 UI/j pour les adultes et 1000 UI/j pour les enfants en prévention de la Covid-19, devrait être prise au sérieux et appliquée au plus vite par les pouvoirs publics des pays de l’hémisphère nord.

Dr Claire Condemine Piron



[1] https://www.youtube.com/watch?v=8UzpvtRqleY&feature=youtu.be

[2] Grant, W.B.; Lahore, H.; McDonnell, S.L.; Baggerly, C.A.; French, C.B.; Aliano, J.L.; Bhattoa, H.P. Evidence that Vitamin D Supplementation Could Reduce Risk of Influenza and COVID-19 Infections and Deaths. Nutrients 202012, 988.

[3] FRANCESCHI, C., BONAFÈ, M., VALENSIN, S., OLIVIERI, F., DE LUCA, M., OTTAVIANI, E. and DE BENEDICTIS, G. (2000), Inflamm‐aging: An Evolutionary Perspective on Immunosenescence. Annals of the New York Academy of Sciences, 908: 244-254. doi:10.1111/j.1749-6632.2000.tb06651.x

[4] https://www.bmj.com/content/356/bmj.i6583

[5] https://journals.plos.org/plosone/article?id=10.1371/journal.pone.0239252

[6] Kaufman HW, Niles JK, Kroll MH, Bi C, Holick MF. SARS-CoV-2 positivity rates associated with circulating 25-hydroxyvitamin D levels. PLoS One. 2020 Sep 17;15(9):e0239252. doi: 10.1371/journal.pone.0239252. PMID: 32941512; PMCID: PMC7498100.

[7] Brenner, H.; Holleczek, B.; Schöttker, B. Vitamin D Insufficiency and Deficiency and Mortality from Respiratory Diseases in a Cohort of Older Adults: Potential for Limiting the Death Toll during and beyond the COVID-19 Pandemic? Nutrients 202012, 2488.

[8] Meltzer DO, Best TJ, Zhang H, Vokes T, Arora V, Solway J. Association of Vitamin D Status and Other Clinical Characteristics With COVID-19 Test Results. JAMA Netw Open. 2020;3(9):e2019722. doi:10.1001/jamanetworkopen.2020.19722

[9] https://www.medrxiv.org/content/10.1101/2020.05.01.20087965v3